DETOUR MORTEL
Tandis qu’un couple reste pour surveiller les épaves, les quatre autres naufragés décident de s’aventurer plus avant sur la route pour s’enquérir d’un téléphone ou d’une habitation quelconque. Ce dont ils ne se doutent pas c’est que sitôt le dos tourné leurs deux amis ont été sauvagement débités et occis. Ils ne vont pourtant pas tarder à découvrir la terrifiante vérité lorsqu’ils tombent sur une masure macabre aux effluves pestilentiels. Un reliquaire de membres humains et de trophées arrachés à des corps saccagés. Surpris par le retour impromptu des trois tueurs dégénérés et déments, ils assistent, dissimulés dans les recoins de la triste demeure, à une séance de boucherie anthropophage pour le moins insoutenable. Profitant du sommeil des bêtes repues, ils s’extraient de l’antre de la géhenne. La chasse morbide s’engage alors entre les quatre proies et la fratrie de prédateurs attardés, démoniaques et féroces.
Délivrance. Pour sûr Rob Schmidt, réalisateur au goût douteux, a vu les classiques de l’épouvante aussi bien horrifique que psychologique. Des références en tête desquelles il place Délivrance de John Boorman (le personnage de Finn allant jusqu’à le citer avant de pénétrer dans le sordide repaire des débiles outardes), Massacre A La Tronçonneuse ou Les Dents De La Mer de Steven Spielberg. De tout ce brouet hétéroclite, infâme et luxuriant qui s’entrechoque sous son crâne la qualité primale qu’il en retire est sans nul doute l’efficacité corrosive et râpeuse. Oubliée la propension récente à fétichiser le genre dans une ironie persifleuse, lounge et narcissique dont le résultat était le désamorçage inéluctable de toute tension dramatique – courant initié par Kevin Williamson et sa trilogie Scream. Ici le cinéaste renoue avec une approche brutale, baroque et sans concession d’une frayeur gore et organique vous saisissant et vous malmenant sans vergogne ou considération. Arrimés dans ce grand-huit sylvestre nous sommes condamnés à subir les pires poncifs et les affres d’un scénario éculé – Glen Morgan et James Wong en avait tiré, malgré la frilosité du réseau FOX, une version plus acerbe et moins binaire dans la série The X-Files (à qui le film emprunte d'ailleurs son chef-opérateur) – qui nous fouettent le visage comme des branches de conifères trop sèches. Et ce, avec la seule certitude que le couple vedette – Eliza Dushku (Buffy, The Vampire Slayer / Angel) et Desmond Harrington (The Hole, Ghost Ship…) –, habitué de ce calibre de production de série B solide, est appelé à échapper au carnage. Ce revival anachronique et écologiste d’une conception eighties d’un effroi absolu – un générique de début, bestiaire mutant d’exactions rebutantes, résume un film d’un autre temps sur les bases duquel s’entame l’évolution de personnages passés de l’adolescence candide à l’âge adulte plus grave tandis que le post-générique annonçant la sempiternelle séquelle nous ramène aux meilleurs temps de l’ornière Maniac Cop : maturité régressive, troublante oxymore s’il en est – où tout doit être montré sans ambages dans sa plus lumineuse atrocité et subjective ignominie semble la concrétisation des velléités qui secouaient Le Projet Blair Witch ou l’intrigant Jeepers Creepers de l’année dernière. Il ne s’agit donc plus de railler des pantins fantoches – archétypes amidonnés de la nymphomane anorexique, de la larguée baroudeuse ou du fumeur d’herbe glabre et léthargique – dans des situations convenues ou pléonastiques mais d’exacerber l’immondice et la violence intolérable pour choquer et révulser le spectateur – déclinaison désespérée de La Colline A Des Yeux par exemple où prédominait encore une croyance dégagée et décomplexée dans la machine cinématographique appelée à produire l’effet de peur. Dans une telle tournure d’esprit il est aisé de faire monter la tension en ôtant toute échappatoire cynique – à la différence du récent et désopilant Destination Finale 2 – sur fond de petit cri strident, enjoué et sardonique digne du mémorable «kilikilikili» accompagnant les sévices d’Audition. Rien à quoi se rattacher dans cette sécheresse cathartique, même pas la distance puisque la frontale promiscuité refuse de détourner les yeux (la caméra vient les chatouiller même à travers le trou d’une serrure). Le talent du responsable des effets spéciaux (grimages des trois ogres et créations numériques) Stan Winston, ayant fourbi ses armes sur Terminator 2 : Le Jugement Dernier, Predator, Jurassic Park ou Alien, fait le reste – on préférera oublier l'étendue son fourvoiement dans le lénifiant La Machine A Explorer Le Temps. Alors réellement la terreur est libre de s’insinuer, de coller aux exhalaisons putrides et détestables de ces chiottes dépenaillés et ineptes de l’Amérique.
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F.
Flament |
Film américano-allemand de Rob Schmidt (2002). Sous l'égide de Délivrance Schmidt et Winston concoctent un manège sylvestre où les personnages sont déchiquetés par la morbidité fangeuse et ricanante du consumérisme. Sortie France : le 30 Juillet 2003.
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